L'entreprise numérique peut-elle faire sans l'Open Source ? Jérôme Filippini (DSI de l'Etat) : "La modernisation de l'Etat ne se fera pas sans l'Open Source"

"Les systèmes d'information de l'Etat sont passés d'une démarche de logiciel libre non-pensée, à une démarche du Libre assumée, et maintenant revendiquée." C'est ainsi que Jérôme Filippini, DSI de l'État a débuté son allocution lors de la cérémonie d'ouverture de l'Open World Forum. Un discours qui a pris des teintes de premier bilan. Après plus d'un an et demi à la tête de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication de l'État, le haut fonctionnaire a en effet été nommé le 3 octobre directeur générale de la modernisation de l'État (DGME).

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Jérôme Filippini a été nommé le 3 octobre à la tête de la direction générale de la modernisation de l'État (DGME). © JDN / Antoine Crochet-Damais

D'abord, Jérôme Filippini a tenu à rappeler que les choix réalisés par l'Etat demeurent "pragmatiques et agnostiques", en fonction des domaines d'application et des besoins fonctionnels et techniques. Pas question donc de favoriser l'Open Source sur les logiciels propriétaires, et réciproquement.

En revanche, le modèle du Libre induirait une relation avec l'écosystème des fournisseurs bien différente. "L'achat de technologies propriétaires s'inscrit dans une démarche traditionnelle d'appels d'offres et de relation contractuelle avec les offreurs, à la quelle s'applique le code des marchés publics", commente Jérôme Filippini. A l'inverse, les logiciels Open Source, déployés à l'initiative des équipes techniques des différentes administrations (avec bien souvent des développements spécifiques à la clés), ne s'inscrivaient pas jusqu'ici dans ce cadre d'achat public. "Ils ne disposaient pas de politiques de gouvernance et d'usage assumées, ni parfois de contrats de support".

"D'où la circulaire que nous avons préparée, et que le premier ministre a signé le 19 septembre dernier, et qui vise justement à éclairer la décision publique en matière d'Open Source", indique Jérôme Filippini. "Elle fait notamment le point sur les cas pratiques éprouvés par les administrations centrales sur l'Open Source, la nécessité pour nos DSI de s'impliquer dans les communautés et reverser les développements. Mais aussi de travailler sur un cadre de référence des composants Open Source, ou encore de mettre en place des démarches d'achats groupés, et favoriser le partage des connaissances sur les logiciels libres."

L'Open Source au service de l'Open Gouvernance

Pour la suite, Jérôme Filippini estime que l'Open Gouvernance à la française ne pourra être mise en œuvre sans l'Open Source. Evoquant le projet data.gouv sur l'ouverture des données publiques comme première étape de la démarche, il enfonce le clou : "Le premier ministre a pris l'initiative de lancer la semaine dernière un nouveau cycle de réformes de modernisation de l'action publique", enchaine-t-il. Or, l'une des colonnes vertébrales de ce nouveau projet est bien la participation des usagers et des agents à la construction du service public. "C'est évidemment là un premier lien qui va se dessiner entre l'Open Source et l'Open Gouvernance", conclut Jérôme Filippini. "C'est bien un modèle plus participatif pour la modernisation de l'administration publique sur lequel nous allons plancher." Un modèle qui devrait donc s'inspirer des logiques de co-conception et de co-innovation issues de l'Open Source.